les marmites où l’eau commençait à bouillir. Au dehors de la cabane, d’autres marmites, suspendues à de grosses branches au-dessus de flammes vives, répandaient des odeurs de gibelotte : et à quelques pas plus loin, autour d’un feu plus doux allumé entre deux pierres plates qui soutenaient une poêle, un marmiton, tel un saltimbanque, jonglait avec des crêpes qu’il faisait tournoyer en les lançant au-dessus de sa tête et en les recevant dans sa poêle avec une adresse incroyable. D’autres convives, transformés en garçons ou en filles de table, étendaient des nappes blanches sur l’herbe verte, y déposaient des jambons entiers, des dindons ou des poulets rôtis, des gâteaux glacés, des tartes aux confitures, des fruits, des bouteilles de vin, de bière ou de cidre. Et ce fut le repas avec sa gaieté folle ; et après, ce fut un sauve-qui-peut général en face des plats vides, et seuls les chaperons, plus lents et moins alertes, restèrent autour de la nappe qu’ils enlevèrent. Les convives jeunes s’en allèrent folâtrer dans le bois, cueillir des fleurs sauvages qu’ils effeuillèrent pour connaître l’avenir ou l’ardeur de leur amour, ou graver leurs noms sur l’écorce de quelques jeunes chênes qui diront aux âges futurs les amours frivoles et passagères.
Rose-Alinda et moi, nous étions allés, à l’écart, nous asseoir au pied d’un gros érable qui étendait ses branches au-dessus du rapide. Adossés au tronc moussu, nous regardions le flot furieux bouillonner, écumer, se jeter avec rage sur les rochers jetés çà et là dans le lit du fleuve. Nous écoutions son chant monotone, toujours le même depuis des siècles et qui devra faire entendre les mêmes