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L’AMOUR NE MEURT PAS

souvent les mêmes choses et cela avait toujours l’attrait du nouveau ; c’était toujours le verbe aimer que nous conjuguions dans tous ses modes et ses temps, infinis comme l’éternité, vrais et beaux comme les désirs de la jeunesse qui se renouvellent sans cesse.

Quand Rose-Alinda allait au bal, je l’accompagnais toujours et nous dansions souvent ensemble. Quand nous n’étions pas partenaires, nous nous placions vis-à-vis l’un de l’autre ou au moins nous nous efforcions d’être dans le même quadrille ou le même lancier. Nos yeux se rencontraient sans cesse ; nos mains se croisaient souvent au milieu du quadrille ou du lancier ; et parfois à de courts instants, pendant la coquette ou la grande chaîne, (oh ! moments ineffables) nous nous trouvions dans les bras l’un de l’autre.

Le soir en été, nous allions, une fois ou deux la semaine, au Square Viger, le beau square fashionable de ces jours lointains. Deux fanfares, La Cité et l’Harmonie, qui s’étaient acquis une réputation presque mondiale, y donnaient alternativement des concerts en plein air. Tout le Montréal élégant et fashionable se rendait au Square Viger pour jouir des concerts attrayants et de l’air pur et frais sous les beaux grands arbres du jardin. Nous nous promenions, Rose-Alinda et moi, dans les grandes allées sur les confins du Square, nous éloignant de la foule et fuyant les oreilles indiscrètes. Nous aimions ces promenades, parce qu’il y avait de la musique enchanteresse, des fleurs au parfum varié et des grands arbres touffus qui tamisaient la lumière trop indiscrète des réverbères. L’amour semblait avoir plus de charmes dans ce cadre délicieux.