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L’AMOUR NE MEURT PAS

lumineux dont l’éclat augmente d’autant plus que la distance qui nous en sépare diminue, ou que le brouillard qui en affaiblissait l’intensité s’évapore. Ce n’était plus du mirage ; la réalité apparaissait et se dessinait clairement. Nos inquiétudes s’évanouissaient, mais l’ennui persistait toujours aussi cruel, car nous étions toujours si loin l’un de l’autre. Je paraissais m’amuser et prendre du plaisir dans les nombreuses soirées dansantes qui se donnaient, mais seul mon corps était présent dans ces réunions de jeunes gens ; mon esprit et mon cœur étaient toujours à Ste-Martine près de ma Rose chérie. J’acceptais toutes les invitations dans l’unique but de me faire connaître et dans l’intérêt de la clientèle que je voulais établir. Ma chère Rose, loin d’en être jalouse, m’encourageait, car elle voulait que son petit docteur eût beaucoup d’amis pour avoir une clientèle plus grande.

J’ai dit : « Le petit docteur », c’est ainsi qu’on m’appelait à St-Césaire par opposition aux deux autres vieux médecins qui étaient des hommes de forte taille, tandis que j’étais tout fluet, pesant à peine cent trente livres. Le 18 mai, ma Rose commence sa lettre par ces mots : « Mon cher petit docteur, permets-moi de t’appeler ainsi puisque ce titre te porte chance dans St-Césaire ». Dans la lettre suivante, Rose fait encore allusion à ce titre : « Comme je suis orgueilleuse de mon petit docteur, » dit-elle. Ce sont là les deux seules fois que ma chère Rose m’ait donné le titre de docteur. Jamais, en dehors de ces deux circonstances, elle ne m’a appelé autrement que par mon nom : Elphège. Ce nom, elle a aimé à le