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L’AMOUR NE MEURT PAS

de notes dans lesquels ma folle imagination se plaisait souvent à inscrire, en prose ou en vers, les errements de la jeunesse ou les aveux de l’amour. Quand elle me remettait mes cahiers, j’étais sûr d’y retrouver au bas de certaines pages une appréciation toujours flatteuse qu’elle traçait de son écriture fine et courante. C’est avec plaisir que je revois aujourd’hui ces compliments d’une jeune fille que j’ai beaucoup estimée. Je l’aimais presque parce qu’elle me parlait souvent de ma Rose et qu’elle se plaisait à cueillir les plus belles fleurs de son jardin, des roses et des pensées, pour que je les envoyasse à ma bien-aimée, qui a su plus tard la remercier par la vive sympathie qu’elle a éprouvée pour elle. Du court séjour que nous avons fait, ma Rose et moi, au milieu de cette famille aimable, nous avons conservé le plus tendre souvenir, et souvent nous nous rappelions avec joie la bonté et les tendresses de Madame Beaure et la gentillesse de ses enfants.

J’aimais St-Césaire, j’aimais ses bons villageois et sa bonne société. J’étais médecin des élèves du couvent et du collège. Je me faisais une bonne clientèle dans le village et la campagne, mais clientèle qui payait si chichement mes soins que parfois j’avais la nostalgie de Montréal. Il me semblait que le cadre dans lequel je me débattais était trop étroit pour mes ambitions qu’il paraissait étouffer. J’aimais l’étude ; j’aimais les livres et les grandes bibliothèques ; malheureusement je n’en avais pas à ma disposition. J’avais des désirs plus grands que ceux du vrai médecin de la campagne ; je visais plus haut ; je n’étais pas fait pour la campagne. Cependant