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L’AMOUR NE MEURT PAS

bon diagnostic avant de prescrire un traitement rationnel. Et encore j’étais rarement certain d’être sur la bonne piste et d’ordonner à propos. Je me fiais souvent à la bonne nature qui joue parfois des tours aux médecins en guérissant la maladie malgré eux et en dépit de leur traitement irrationnel. Je prescrivais toujours les médicaments à doses si faibles qu’ils ne pouvaient jamais faire de tort s’ils ne faisaient pas de bien. Quand je revins à mon bureau, je m’étendis sur mon sofa, pour rêver tout éveillé à mon bonheur, penser longtemps à ma Rose et me réjouir de son arrivée ; mais j’étais si accablé et il était si tard que mes yeux se fermèrent malgré moi et que je m’endormis du plus profond sommeil.

Du jour au lendemain, mon existence à Lowell changeait complètement. J’avais cependant le même petit bureau dans le même petit appartement ; je continuais d’être rédacteur à L’Étoile, je recevais des malades à ma consultation ou je faisais des visites à domicile comme avant, mais il me semblait que mon bureau, naguère si triste, si désolé, si sombre, avait une apparence plus gaie, plus réjouie et que le soleil y pénétrait plus facilement, que ses rayons se jouaient plus aisément sur ma petite table auprès de laquelle je trouvais une plus grande ardeur au travail, plus de facilité et d’imagination dans la composition de mes articles de L’Étoile. Le vieux Pégase même me semblait plus docile et plus maniable ; les Muses m’inspiraient plus rapidement. Mon sofa, aux ressorts aplatis et durs, me paraissait plus élastique ; l’oreiller sur lequel reposait ma tête, la nuit, était doux comme un tissu de velours, et moelleux