pas elle qui me procurera le bonheur de passer ici avec toi le temps de tes vacances ?…
22 juin, mardi 10 hrs p.m. — Ma chère Rose, te souviens-tu, un soir à Montréal, tu étais assise au salon dans la grande berceuse ? J’étais à tes côtés ; tout à coup tu tends les bras ; tes mains se joignent en l’air avec bruit et je te dis : « Que fais-tu, méchante ; pourquoi faire mourir les petits anges, les petits papillons ? » — « Elphège, me réponds-tu, ce ne sont pas des petits anges, ni des papillons ; ce sont des insectes qui donnent naissance aux mites ». Et le papillon, plutôt l’insecte avait échappé à ta sage cruauté. Il y a un instant, quand j’entrais dans mon bureau, je vis voler une de ces petites mouches aux ailes blanches ; comme toi j’ai tendu les bras ; j’ai frappé mes mains l’une contre l’autre et je n’ai pas tué la petite mouche qui a continué son vol. Heureux petit insecte au vol rapide ! quel mal peut-il faire dans mon bureau, puisqu’il n’y a rien ici pour le nourrir. Vois donc, ma chérie, comme je suis fou de rappeler ces souvenirs enfantins. Mais, chérie, y a-t-il un souvenir, si peu important soit-il, qui, rappelant une amie ou une heure douce, n’ait pas un charme tout particulier, indéfinissable ?
Jeudi, 22 juin, 10 hrs p.m. — Depuis trois jours il fait un temps de chien. Aujourd’hui la pluie torrentielle n’a pas cessé un seul instant de tomber, et, comme tu peux te l’imaginer, je n’ai pas reçu la visite d’un seul patient, aussi ai-je écrit et lu à m’en fatiguer. J’ai eu encore le temps, plus que jamais, de penser à toi. Il n’y a pas un seul livre qui me tombe sous la main sans que je