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L’AMOUR NE MEURT PAS

Beaux rêves, où êtes-vous ? douce réalité, apparaîtras-tu jamais à mes yeux et à mes sens ? Ne te laisseras-tu jamais palper ? Et toi, ma Rose, ma fiancée, dont j’adore l’image placée sur ma table comme un dieu sur l’autel, seras-tu toujours loin de mes yeux qui te cherchent toujours et partout ; loin de mes bras qui se tendent continuellement pour t’enlacer ; loin de mon cœur qui veut battre à l’unisson du tien. Ce que je souffre parfois, ma Rose, ne peut pas se dire. Le corps malade a des gémissements pour manifester sa douleur ; le cœur brisé a des larmes pour calmer ses angoisses ; l’esprit vaincu a l’espérance pour adoucir ses revers ; mais l’âme accablée, l’âme abattue n’a que le silence morne et la mort où se réfugier. Parfois il me semble que la mort rôde autour de moi et me guette, tant j’ai l’âme affaissée. Oh ! ma Rose, qu’il est triste de vivre seul, toujours seul, sans avoir près de soi un cœur qui comprenne les accents du nôtre. Quand donc près de moi soulageras-tu ma douleur morale et dissiperas-tu les inquiétudes de mon âme ? Tu vois, chère Rose, quel jour affreux vient de s’éteindre et quelle nuit triste va éclore…

Dimanche, 19 juin, 8½ hrs p.m. — Qu’ai-je donc fait pour être toujours si malheureux ? Ah ! le vilain caractère que je possède ! Pourquoi ma mère m’a-t-elle donné un esprit aussi affectueux, une âme aussi aimante ? Pourquoi m’a-t-elle façonné un cœur aussi passionné ? Oh ! mère chérie, je te remercie de tes dons ; j’accuse plutôt l’ironie du temps, la raillerie du sort qui semblent m’en vouloir. Vois donc, aujourd’hui dimanche et je