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Ste-Martine, 6 juin, 1887, 8½ hrs p.m. — Mon bien-aimé fiancé… Je te remercie beaucoup du morceau de gâteau que tu as eu la bonté de m’envoyer. Il m’a donné un peu de distraction pendant deux nuits et deux jours. La première nuit, je n’ai pas rêvé à toi, loin de là. Mais, mon cher, n’ouvre pas si vite de trop grands yeux ; sois sans inquiétude ; mon rêve ne peut pas te rendre jaloux. Je n’ai vu en songe que des religieuses. Le second soir, j’ai mangé un autre morceau du gâteau pour essayer de rêver à toi ; si je n’avais pas réussi ce soir-là, je crois que j’en aurais mangé tous les soirs pour atteindre mon but. Le second soir je n’ai rêvé qu’à toi seul, mon cher Elphège. Permets-moi de te raconter ce songe qui te fera un peu sourire. Tu désirais te marier à tout prix et tu me disais : « Si tu voulais, ma Rose, nous achèterions un petit magasin et nous ferions le commerce des épiceries afin de subvenir à nos dépenses de ménage pendant que je serai encore étudiant ». Ta proposition ne me convenait pas du tout et tu en avais beaucoup de chagrin. Drôle de rêve, qu’en dis-tu ? Peu importe, j’ai rêvé à toi, je suis donc certaine de t’avoir pour mari… Loin de me décourager et de m’alarmer, l’article de l’Étoile me met du baume dans le cœur, parce qu’il me prouve que le petit médecin prétentieux, qui l’a écrit, est jaloux non seulement de tes capacités en médecine, mais surtout de tous les autres talents qui paraissent le jeter dans l’ombre… Mille baisers de ta Rose.


Charmante et bonne Rose, toujours elle trouve