Page:Detertoc - L'amour ne meurt pas, 1930.djvu/152

Cette page a été validée par deux contributeurs.

les ressorts brisés n’amortissent plus les chocs. Je m’accroche, autant que je le puis, aux ferrailles qui restent encore au dossier du siège, mais n’empêche que j’ai failli culbuter trois ou quatre fois en bas de la voiture à cause des mouvements désordonnés qu’elle subit dans les ornières, les trous et aux tournants de la route. Me voilà donc comme un vieux médecin de campagne, dans une vieille voiture qui file à toute la vitesse que le cheval peut endurer sur des routes impossibles. L’air est frais et pur ; on le respire à pleins poumons. Des champs reverdis monte encore la buée que le soleil levant va bientôt dissiper. Enfin le cheval, tout trempé et essoufflé, s’arrête devant la porte d’une petite maison coquette. Je pénètre dans une demeure qui sent bon et respire la paix et le bonheur.

La malade est dans son lit sous des draps blancs ; elle attend avec impatience mon verdict ou mon diagnostic ; et le mari, dans la chambre voisine près de la porte, interroge ma figure. « Rien ne presse, Madame ; je reste ici, je vais attendre ».

Je passe dans le salon, en jetant un regard discret par toute la maison. Tout est simple, mais tout est en ordre ; la maison est aussi coquette en dedans qu’au dehors. Des tapis, faits à la mode de nos campagnes du Canada, couvrent le centre des planchers jaunis à la lessive ; les meubles modestes sont luisants ; les rideaux, en cretonne de couleur et en dentelle, tamisent la lumière trop ardente du soleil. Le salon est moins modestement meublé : un tapis plus beau couvre entièrement le