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L’AMOUR NE MEURT PAS

des avocats, des notaires, des courtiers, des étrangers, des étudiants, des professeurs. C’était là, le matin, le lieu de la vie active, du struggle for life, du monde qui s’interpelle, se pousse, se bouscule pour arriver bon premier. Dans l’après-midi, la physionomie du quartier changeait complètement. La population, plus dense, plus variée, moins empressée ou moins affolée, cheminait avec plus de lenteur ; c’était l’heure des désœuvrés, des curieux, des amoureux, du monde qui s’ennuie, des femmes qui étalent leurs richesses et leurs toilettes ; c’était l’heure des rendez-vous. Peu après trois heures, les beaux équipages, les phaétons, les coupés, les victorias, les landaus, les tilburys, les charrettes anglaises, venaient de l’est, du nord ou de l’ouest de la ville par les rues St-Denis ou Beaver-Hall et circulaient aux pas lents et dansants de leurs beaux chevaux sur les rues St-Jacques et Notre-Dame, entre les rues Bonsecours et McGill, jusque vers les six heures. Les riches s’arrêtaient aux portes des grands magasins Mussen, Hamilton, Morgan, Hensley, Carsley pour y voir les nouvelles modes ou y faire leurs emplettes.

La chaussée était toujours encombrée des riches équipages qui excitaient l’envie des pauvres piétons. Sur les trottoirs, la foule considérable, composée des gens de la classe aisée et de ceux qui cherchent plus les distractions que le repos, allait avec la lenteur des désœuvrés ou des amoureux. On s’arrêtait aux vitrines pour admirer les nouveautés ; on se formait en groupe pour causer des nouvelles du jour, annoncer ou apprendre un mariage, des fiançailles, s’inviter à un bal, à une soirée