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Seigneur n’a-t-il pas dit : « Tu quitteras ton père et ta mère ». Cette loi n’est pas trop dure parce qu’elle offre une consolation à qui quitte son père et sa mère « pour suivre son époux ou son épouse. » Moi. j’ai tout quitté, ma mère, mes frères, le toit paternel ; mais je n’ai pas suivi mon épouse, ma fiancée, et elle ne m’a pas suivi. J’ai tout quitté seul, dans l’espoir de revenir bientôt chercher mon épouse, ma consolation. Mais comment pourrai-je jamais revenir la chercher ? et quand le pourrai-je ? On semble me dédaigner, on s’éloigne de moi, on me discrédite. Pourquoi pleuré-je ? Ce qui a rompu les digues qui retenaient mes larmes prisonnières, c’est l’idée, la pensée que je ne reverrai pas ma Rose de sitôt, parce qu’il me faudra peut-être abandonner tout espoir de succès ici. Hélas ! le temps impitoyable déroule devant moi ses heures sombres et lugubres ; et pas une de leurs minutes ne fait briller à mes yeux la moindre petite lueur d’espérance. Ah ! temps cruel, tes heures si rapides sont encore à mon désespoir des siècles de douleur, de tristesse et d’infortune…

6 heures p.m. — Cet après-midi, j’ai visité le reposoir à l’église canadienne. En entrant dans le temple j’ai cru pénétrer dans les sanctuaires de Montréal, tant la parure de l’autel était belle et ressemblait aux nôtres. J’eus un moment d’illusion de plus ; tout à coup je crus t’apercevoir dans la foule, en la personne d’une grande demoiselle élégante, blonde, aux cheveux peignés comme les tiens. Illusion, cruelle erreur ! j’étais seul dans la foule et tu n’y étais pas. Je me suis agenouillé au pied de l’autel, devant le Saint-Sacrement, et j’ai prié pour