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L’AMOUR NE MEURT PAS

dre le jour qui tardera peut-être longtemps à luire de nouveau. Rose, je suis seul, et mon espoir et ma foi dans l’avenir, c’est ta douce image que je contemple et que j’embrasse du baiser des fiançailles…

Je me prépare à me coucher enfin sur le lit misérable du médecin pauvre, sur mon vieux sofa en crin. Il est dur ; les ressorts aplatis sont inégaux ; l’oreiller est fait de grosses plumes piquantes ; les couvertures sont minces et froides. Qu’importe, il me faut connaître la misère par moi-même pour mieux soulager celle des autres. Mon sacrifice est fait et je suis prêt à tout endurer, à tout souffrir pour ma Rose, pour l’aller chercher plus vite. Que ne ferais-je encore de plus dans le même but ? Rose, ma chère Rose, je fais ma prière du soir à genoux devant ton image, demandant ardemment à Dieu de m’exaucer, car je demande le bonheur pour toi, ton amour sincère pour moi et une sainte union pour nous deux. Je te donne un dernier baiser avant de me jeter sur mon grabat. Il me semble déjà que l’appel de la souffrance va ébranler ma cloche et la faire résonner agréablement à mes oreilles qui veilleront seules. Je vois en esprit le dévouement qui veille lui aussi au-dessus de ma couche : il semble se pencher pour secouer, à la moindre alerte, mes membres engourdis par l’ennui et le froid.

Mardi matin, 5 avril, 8½ heures. — Il y a juste une heure que je suis levé. Toute la nuit j’ai grelotté. J’ai à peine fermé l’œil tant il faisait froid dans ma chambre. Ma maîtresse de pension, si bonne, si prévenante, m’avait cependant donné, hier au soir, une autre couverture en laine bien épaisse ; mais le froid était si grand