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per à la porte et y jeter une lettre de ma Rose ? Oh ! alors j’ai compris ce qu’était la pluie pour les moissons brûlées par la chaleur torride ; ce qu’était la rosée pour la fleur flétrie ; ce qu’était la goutte d’eau pour celui qui a soif ; ce qu’était le souvenir pour l’exilé ; ce qu’étaient les manifestations de l’amour pour le cœur ardent.

Lettre mille fois bénie, tu fus la bienvenue comme tu avais été la désirée. Oh ! entendre parler d’elle, de ma douce fiancée ; l’entendre parler ; revoir son écriture ; sentir son cœur s’ouvrir ; lire sa pensée ; comprendre ses sentiments ; voir la trace de ses larmes, car elle a pleuré elle aussi ; compter ses soupirs à chaque phrase ! C’est alors que j’ai le mieux compris ce qu’avaient été pour elle le départ, l’éloignement, l’exil de son Elphège. Je lus et relus cette lettre tout imprégnée des plus tendres sentiments de son cœur si aimant. Ma Rose me disait comme elle avait pleuré depuis mon départ ; comme elle pensait à moi ; comme elle revoyait souvent ma photographie ; comme elle la baisait. J’étais altéré des bons sentiments ; j’avais soif des expressions ardentes de l’amour, et je trouvais tout dans cette lettre que je tenais comme on tient à deux mains la coupe qu’on craint de laisser échapper. Je buvais à longs traits la liqueur si douce, si rafraîchissante, si calmante.

Dans l’après-midi, je répondis longuement à cette lettre. Ce fut peut-être la lettre la plus touchante, la plus tendre que j’aie jamais écrite. En la relisant aujourd’hui, je comprends pourquoi des larmes en ont effacé les caractères à certains endroits.