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la prévenir ; si, dis-je, par cette crainte on va jusqu’à soutenir qu’il faut que les formes soient tellement favorables à l’accusé, que beaucoup de coupables puissent se sauver de peur qu’un innocent ne puisse succomber, je dis que par humanité on pose de tous les principes le plus cruel. Si l’on pense un moment avec moi à tous les crimes qu’engendre cette espérance d’impunité, et à toutes les victimes innocentes de ces crimes, on verra que l’humanité même conduit à un résultat diamétralement contraire.

On pourrait faire des volumes sur chacun des sujets que je viens de parcourir ; mais je ne veux qu’indiquer des vues. Si elles sont justes, quiconque en mettra quelques-unes à exécution aura contribué puissamment à fonder la saine morale dans sa patrie. Tout est dans ce principe par où j’ai commencé, que ce que l’on peut faire de plus efficace pour parvenir à ce but est de rendre aussi inévitable que possible la punition des crimes. Passons à des objets d’une moindre importance.

Chap. II. De la répression des délits moins graves.

Après la punition des crimes, rien n’est si intéressant que la répression de la friponnerie de toute espèce. Ce chapitre qui ne peut tenir que peu de place ici, doit en occuper une grande dans la tête de l’homme d’État. Il ne peut malheureusement pas punir directement tout ce qui est blâmable ; mais il peut avec art disposer les choses de manière que tout mauvais déportement devienne matériellement préjudiciable à son auteur, sans compter la punition de l’opinion publique qu’il ne pourra éviter si