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tueuses dès qu’il y aura quelques hommes capables de les rendre utiles, et d’autres disposés à en profiter.

Voilà tout ce que j’avais à dire sur l’éducation morale des hommes. Passons à celle des enfans.

§. II. De l’Éducation morale des Enfans.

Elle est déjà faite si leurs parens ont de bonnes habitudes, et sont pour ainsi dire moulés par de sages institutions. Elle est impossible si la société est livrée aux préjugés, aux vices, au désordre. J’en appelle à l’expérience de chacun. Est-ce jamais sur ce qu’il a entendu dans les classes, dans les sermons, dans les exhortations publiques, que se sont formés les sentimens et les inclinations de son enfance ? n’est-ce pas bien plutôt sur ce qui l’entourait, sur ce qu’il a vu, senti, éprouvé dans tous les instans ou on ne s’occupait pas de l’endoctriner ? Si les pères sont imbus de mauvais principes, ou les maîtres les partageront, ce qui est le plus vraisemblable, et ils leur prêteront une nouvelle force : ou ils les combattront, et alors ils ne seront ni écoutés, ni crus, ni suivis ; mais complettement inutiles. J’ai donc eu raison d’avancer que l’éducation morale des enfans ne pouvait jamais être que la conséquence de celle des hommes. Et quelle qu’elle soit elle sera bientôt réformée ou détruite par les circonstances qui les environneront et les institutions qui pèseront sur eux à l’âge où ils prendront leur rang dans la société. D’ailleurs on peut bien dépraver par mille sottises le bon sens naturel d’un enfant ; mais il est physiquement impossible de donner aucun vrai principe de conduite