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Je serais moins embarrassé si l’on me faisait quelques objections ; il ne s’agirait que de trouver pourquoi elles sont mal fondées. Mais ici il ne faut rien moins que deviner quelles objections on pourrait faire, aller au-devant, les empêcher de naître, et montrer d’avance que si elles se produisaient au jour, elles seraient sans solidité. Cette tâche est difficile. Si on me l’impose, ne serait-ce point (suivant ce que nous avons dit des jugemens d’habitude, chap 14 du premier volume) que la force de mes raisons a entraîné l’assentiment, et commandé le jugement réfléchi du moment ; que l’on sent ensuite que les jugemens habituels renaissent invinciblement, quoique sans motifs légitimes, comme celui de la grandeur de la lune à l’horison, ou du rivage qui marche quand je suis dans le bateau ; et que l’on voudrait être débarrassé par moi de ces récidives incommodes dont on sent le faux, mais qui importunent. Si cela est, on veut que par des raisons je fasse l’effet du tems ; cela est impossible, car chaque cause a un effet qui lui est propre. Les raisons convainquent, le sentiment entraîne, les prestiges étourdissent, le tems seul et la fréquente répétition des mêmes actes produisent l’état de calme et d’aisance nommé habitude. il n’y a