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effet, qu’il était de jurisprudence, dans notre tribunal, d’infliger trois mois de prison aux femmes adultères. Mais cette fixité m’a toujours ahuri et je ne sais en percevoir les raisons. Il est aussi saugrenu de tarifer l’adultère qu’il le serait d’appliquer un mois pour toute prévention de coups et six mois pour toute prévention de vol. Le législateur, en nous fixant un minimum et un maximum, nous a invités à proportionner la peine à l’infinie variété des espèces. Je m’insurge contre une tradition qui m’enlèverait le peu de liberté qui m’a été laissée. Elles sont d’ailleurs indéfendables, ces traditions qui s’établissent dans certains tribunaux, on ne sait pourquoi. Habitudes locales que ne bouleverse point suffisamment une vision plus étendue. En France, à quelques lieues d’ici, sous une législation analogue, dans un milieu de même civilisation, quelques francs d’amende punissent ce que vous punissez de trois mois d’emprisonnement. Pourquoi ? D’ailleurs, j’insiste beaucoup moins sur la nature de la peine que sur l’octroi du sursis. Sur ce point, vraiment, quel que soit mon désir de vous obliger, je ne puis faire de concession.

— Mais vous n’y pensez point, Jacquard, la condamnation conditionnelle pour une affaire de mœurs ! Ce serait contraire à tous les précédents, à l’esprit de la loi. Nous l’avons toujours refusée !

— Il y a toujours un temps pour accomplir une chose que l’on reconnaît juste. Et si je vous convaincs, ce que j’espère, du bien-fondé de mon sentiment, je vous estime trop pour croire un instant que votre erreur passée vous empêchera de faire ce dont, après meilleur examen, vous aurez admis la légitimité. Le texte, d’abord ! Il est général et