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jean macé

hardi de vouloir me faire une opinion personnelle sur d’aussi grosses questions, de vouloir la faire imprimer surtout, que je ne lâchais pas une phrase sans lui avoir fait son procès en règle, craignant d’une part d’aller trop loin, ne pouvant me décider de l’autre à rester en route dans l’expression de la pensée qui m’arrivait. On se servait déjà du motradical dans ce temps-là, et il me sonnait assez mal à l’oreille comme il fera de tout temps aux indifférents en politique, qui ne se donnent pas la peine de descendre au fond, à la racine des questions. Jugez de mon épouvante quand j’en vins à me dire que j’avais tout l’air de glisser dans le radicalisme. »

Je viens de la lire, cette petite brochure, qui fut signée Jean Moreau. Son radicalisme nous paraîtrait aujourd’hui bien timide. Mais si l’on se reporte aux événements de l’époque où elle a été écrite, à ces réclamations énergiques des libéraux de tous rangs sur la réforme électorale, on doit reconnaître que Jean Macé n’était pas en réalité parmi les partisans des demi-mesures. Il n’allait pas jusqu’à demander le suffrage universel, mais il ne s’en fallait guère. Il eût voulu que chaque garde national fût électeur. Peut-être cette solution était-elle la meilleure. La France n’était nullement préparée à l’exercice du suffrage universel. De là les fautes de ce suffrage aux divers scrutins qui suivirent. L’Empire est né de cette inexpérience politique.