Page:Dessoye - Jean Macé et la fondation de la Ligue de l'enseignement, 1883.djvu/31

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
9
et la ligue de l’enseignement

Les débuts de Jean Macé datent de 1848. On était en janvier. La révolution approchait. La fermentation des esprits était à son plus haut degré. Étendrait-on le droit électoral, comme le demandait l’opposition ? Le gouvernement aurait-il au contraire la force de résister ? S’il cédait, à quel point s’arrêterait-il ? Questions graves qui, pour n’avoir pas reçu à temps leur solution, devaient six semaines plus tard renverser la monarchie. Jean Macé jusqu’alors ne s’était guère occupé de politique. L’importance du moment l’étreignit vivement. Il voulut, il crut devoir, lui aussi, pousser son cri dans la mêlée. Il lança une brochure, les Lettres d’un garde national à son voisin. Écoutons-le nous dire lui-même sous l’empire de quel sentiment intime il l’écrivit :

« J’approchais alors de trente-trois ans, et je ne m’étais encore jamais occupé de politique ; autrement dit, je n’avais pas pris au sérieux jusque-là mes devoirs de citoyen, dont on ne m’avait pas assez parlé quand j’étais à l’âge où l’on doit vous parler de ces choses-là. Je n’oublierai jamais ce moment de ma vie où les idées de patrie et de justice se dressèrent pour la première fois, de toute leur hauteur, devant moi, et entrèrent en maîtresses dans mon âme qu’elles n’avaient fait encore qu’effleurer. Je restai enfermé dans ma petite chambre, sans presque dormir, ni manger, tant que dura ce travail entièrement nouveau pour moi. Et cela me paraissait si