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tement reprocher à tous nos hommes politiques, d’avoir, depuis dix ans, commis une faute inexcusable, en se laissant persuader que l’Angleterre avait le désir de nous gouverner d’après nos vœux et nos besoins !

Retirer aux colonies toute protection sur les marchés métropolitains, c’était leur dire : « L’heure de la séparation est arrivée. » Voilà ce que l’on a compris ici, et on ne pouvait pas tirer d’autre conclusion logique que celle-là : mais on a vu bientôt que le servilisme ministériel ne comprenait rien à tout ce qui n’est pas intrigue, bassesse, lâcheté !

La démarche des annexionnistes n’était qu’une conséquence toute naturelle de la politique adoptée par l’Angleterre ; mais on leur a prouvé bien vite, que sous le gouvernement responsable, être logique et honnête, c’était être séditieux ! !

Il y a, de l’aveu de tout le monde, similitudes de tendances sociales, de besoins généraux ; convergence mutuelle d’intérêts politiques, commerciaux, industriels, entre les États-Unis et le Canada. Ces deux grandes sections de l’Amérique sont évidemment destinées, ne serait-ce que par la configuration topographique de ce continent, à ne faire qu’un seul et même pays.

Nul obstacle infranchissable, nulle barrière naturelle ne les sépare. La grande artère navigable qui les divise semble bien plutôt destinée à les unir commercialement, qu’à être la ligne de démarcation de deux nationalités. Le St. Laurent leur est également nécessaire ; et d’ailleurs, dans nos climats, la nature se charge de souder ses rives pendant plusieurs mois de l’année. On dirait qu’elle veut nous faire sentir que ce beau fleuve doit être, pour les deux pays, un lien et non une frontière.

En un mot notre situation est un solécisme en politique comme un paradoxe eu géographie !

L’ordre de la providence a été détruit, ou plutôt dérangé momentanément par les combinaisons, les folies humaines. L’Américain qui vit sur le bord des grands lacs ne peut pas se rendre à la mer par la voie que Dieu lui-même lui a tracée : il faut qu’il creuse une immense rivière artificielle de 400 milles de longueur qui déjà ne suffit plus à l’incroyable développement de son industrie. L’habitant des bords du lac Champlain est, lui aussi, obligé de forcer la nature pour