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vant, d’un système politique sous lequel les hommes publics d’un pays sont forcés de dire journellement le contraire de ce qu’ils pensent en secret, ou, en d’autres tenues, ne peuvent être dans la vie publique, ce qu’ils sont dans la vie privée, d’honnêtes gens ? Qu’attendre de bon d’un système qui a pu fausser à ce degré, dans les masses comme chez les individus, le sentiment du devoir, les notions du juste et de l’injuste ; qui a fini, en un mot, par étouffer, anéantir cet être moral que l’on nomme la conscience publique ?

D’ailleurs, qu’est-ce qu’on décore, dans ce pays, du titre d’institutions ? Des lois faites hier pour être changées demain ! ! des lois dans lesquelles on n’a tenu aucun compte, des positions géographiques, des besoins généraux, des droits politiques, des idées reçues, des habitudes, et même du langage du peuple auquel on les destinait ! !

Tout ce qui n’a aucun caractère de stabilité ou de fixité, tout ce qui n’est ni l’expression de la volonté générale, ni l’expression des idées communes qui prévalent, chez un peuple ; tout ce qui n’a ni racine dans les mœurs publiques, ni importance avouée dans les opinions individuelles ; tout ce qui, dans le système politique, peut être modifié, altéré, détruit, sans qu’il s’en suive une perturbation dans l’ordre social ; tout ce qui surtout dépend, non des volontés locales, mais d’une volonté étrangère sur laquelle celles-là n’ont aucun contrôle, tout cela ne mérite pas le nom d’institutions politiques, et ne constitue pour un peuple qu’une manière d’être plus ou moins précaire ; un mode d’existence vague, exceptionnel, transitoire, qui n’a ni objet utile ni bons résultats possibles !

Ainsi, Messieurs, il n’existe pas, à proprement parler, en Canada, d’institutions politiques.

Ce que nous avons c’est un système bâtard et menteur, une pure rouerie administrative, une véritable filouterie de bureau : on nous a donné cela sans nous consulter, on peut nous l’ôter de même ! Quelques lois mal digérées et appliquées sans intelligence, qui ne forment en réalité, qu’une espèce de Babel législative incompréhensible pour ceux-là même qui l’ont élevée, ne constituent pas nécessairement un bon système politique ! !

Tout cela n’a pu être rêvé que par des fourbes ; imposé que par d’impudents despotes ; accepté de confiance que par