river à des proportions à peine suffisantes, pour nous permettre de songer à notre émancipation !
« Mais ce peuple était libre, et nous sommes restés colons ! Ce peuple avait brisé ses entraves, et nous, nous avons doré notre joug ! Quand ce peuple a voulu faire une révolution, les professeurs de droit divin ne sont pas allés lui dire que toute révolution était défendue ; que désirer l’indépendance, c’était de la démagogie ; que la conquérir, c’était renverser l’ordre établi par Dieu, bouleverser la société, détruire les idées religieuses ! On ne lui a pas dit que le dogme de la souveraineté du peuple était une impiété ! Il n’a pas, comme nous, entendu ses pasteurs, lui dire, du haut de la chaire de vérité, que de tous les systêmes, celui de la souveraineté du peuple était le plus faux, le plus absurde, le plus méchant ! (Sermon prononcé à la Cathédrale de Québec le 1 Avril 1810.)
« Aussi, ce peuple est devenu grand, heureux, riche et puissant, parce qu’il a fait une glorieuse révolution ; et nous, nous sommes restés petits, pauvres, sans énergie sociale, sans esprit de progrès, sans importance politique, sans influence morale, parce que nous n’avons pas voulu nous joindre à lui. »
J’ai toujours compris, Messieurs, qu’un Anglais avait le droit de me dire ; « Je suis un de vos maîtres ! — Vous êtes presque mon sujet ! L’Angleterre possède le Canada, et il lui est loisible, soit de vous protéger, soit de vous exploiter, de vous pressurer, de vous maltraiter, de vous gouverner aussi tyranniquement qu’elle le voudra, sans que vous puissiez avoir recours à autre chose qu’aux remontrances et aux prières ! Vos volontés ne sont quelque chose qu’en autant que nous voulons bien le permettre ! Mettez d’un côté les seize cent mille habitants des deux Canadas, et de l’autre le secrétaire des colonies ; la balance descend sous celui-ci ! Dix fois les idées d’un de ses commis ont prévalu sur les désirs de vos chambres !
« Vous n’êtes pas des esclaves, sans doute ; mais, dans l’ordre politique vous êtes une espèce de juste-milieu entre l’esclave et l’homme libre ; vous formez la transition de l’un à l’autre ! Vous êtes le chaînon qui les unit. Vous croyez vous gouverner vous-mêmes ! Pauvres gens, vous