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pos : d’après Lord John Russell, ils ne se sont pas trompés sur la question du droit, mais seulement sur celle de l’apropos ; il n’y a rien là qui comporte une violation de la constitution, car jamais une opinion erronée n’est punissable ! Or les annexionnistes se sont strictement renfermés dans le domaine de l’opinion, dans les bornes de la discussion réfléchie et consciencieuse : pas un acte répréhensible, pas une démarche douteuse, pas un semblant d’action secrète et cachée ne peut leur être reprochée ! Il n’y avait donc pas matière à destitution ! Eh bien, Messieurs : comment donc qualifier un gouvernement qui a l’air de se venger de ceux qui ont outragé les lois et l’ont fait frissonner de peur, sur ceux qui ont respecté les lois, mais sur la modération desquels il savait pouvoir compter ? En vérité, n’est-on pas tenté de croire, d’après ce qui s’est passé, ou plutôt ce qui ne s’est pas passé depuis un an, que si les annexionnistes, au lieu de se retrancher soigneusement dans les bornes de de la légalité, avaient, eux aussi, fait du brigandage à main armée, incendié les édifices publics, tenté d’assassiner le gouverneur-général ; n’est-on pas tenté, dis-je, de croire que les ministres auraient peut-être préféré leur alliance à celle qu’ils ont tacitement contractée avec le parti qui a commis toutes ces atrocités ? N’est-ce pas un fait notoire aujourd’hui, que les opposants à l’annexion sont, en premier lieu le ministère et ses fidèles, en second lieu ses plus violents ennemis de l’année dernière ?

Les destitutions sont la conséquence de cette mauvaise et absurde pratique gouvernementale toujours conservée et chérie par les ministres malhonnêtes, les gouvernements de parti qui disent, sans le croire, qu’on ne peut pas administrer les affaires publiques sans corrompre les hommes ; mais qui savent, et ne l’avouent jamais, que le patronage fait pour un ministère l’office de l’ancre de sûreté pour un vaisseau ; il l’affermit contre la tempête. Je veux parler de la nomination des fonctionnaires sous bon plaisir.

Je dis que c’est une mauvaise et absurde pratique, parce qu’elle donne au gouvernement une influence indue et toujours dangereuse, car le patronage n’a jamais servi qu’à restreindre les droits des peuples et à faire accepter l’oppression par ceux qui ne voient dans la politique qu’un moyen de gain, de for-