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par leurs propres actes de conséquence en conséquence, ils en soient arrivés à proclamer la morale des intérêts comme la seule règle utile à suivre en politique, laissant la morale des devoirs aux imbéciles ! !

On a cherché à vous démontrer la supériorité pratique du principe de l’utilité sur celui du droit ! On vous a dit que dans tout système politique le devoir était une fiction, l’intérêt seul une réalité ! Plusieurs se sont laissés prendre à ces étranges principes ; le grand nombre n’en a pas saisi la portée ; quelques uns n’ont vu là que la tactique invariable des petits esprits et des mauvaises consciences.

Au reste, il n’est nullement étonnant que les hommes qui ont sacrifié les droits de leurs pays aient voulu fausser, chez le peuple, la notion du devoir. On sentait malgré soi son côté faible : et d’ailleurs c’est ordinairement le transfuge qui aime à plaisanter sur l’honneur ! !

« La morale des intérêts, dit M. De Chateaubriand, est par le fait anti-sociale. Que dit la conscience ? Respectez le bien d’autrui. Que disent les intérêts ? Prenez le bien d’autrui. La morale des intérêts prend donc pour levier les vices des hommes au lieu d’agir avec leurs vertus.

« Qui remplit ses devoirs, s’attire l’estime : qui cède à ses intérêts est peu estimé. Les partisans de la morale des intérêts puisent donc un principe de gouvernement dans une source de mépris. »

Il est donc vrai, Messieurs, que c’est la morale des intérêts et non celle des devoirs qui est subversive de l’ordre social. Il est donc vrai que ce sont les partisans de la morale des intérêts, les adeptes du principe de l’utilité qui sont les vrais démagogues ! ! Il n’y a donc, en Canada, de démagogues que les ministériels du jour.

La morale des devoirs, c’est l’honneur, c’est la conscience !

La morale des intérêts, c’est la cupidité, c’est l’égoïsme.

L’une est toujours noble, consolante, glorieuse. L’autre est ordinairement basse, sordide, méprisable.

Celle-là élève le cœur, celle-ci-le dessèche : celle-là ennoblit les sentiments, celle-ci les avilit : celle-là moralise les masses, celle-ci les dégrade : celle-là produit l’indépendance de caractère ; celle-ci la détruit : celle-là engendre le dévouement, celle-ci les trahisons : le devoir découle de l’hon-