la fortune publique de chaque état. Il n’est pas, comme ici, obligé d’attendre quatre années pour chasser un homme qui le trahit, parce qu’une place est là qui lui miroite aux yeux.
La majorité de chaque législature représente réellement l’opinion du peuple de chaque état. De plus ce peuple est assez instruit pour surveiller exactement ses mandataires, et pour savoir au juste ce qu’il paie et quel emploi on fait de son argent. Il n’est pas exposé à être trompé comme le peuple de ce pays-ci l’est tous les jours. Il sait que les frais d’administration n’absorbent pas, comme ici, plus de la moitié du revenu public. Il voit, tous les jours, le produit des taxes qu’il paie employé avec intelligence ; il sent qu’elles lui sont profitables parce qu’on lui rend en améliorations utiles, productives, la valeur de l’argent qu’il donne.
Voilà pourquoi il ne les regarde pas comme un fardeau.
En peut-on dire autant du peuple du Canada, Messieurs ?
Pour le Haut-Canada, qui a tout englouti, je sais qu’il est content.[1] Mais qu’a-t-on donné au Bas-Canada en échange des sommes qu’on a empruntées sur son crédit seul, car à l’époque de l’Union, le Haut-Canada était, de fait, en banqueroute ? Des chemins dans le Haut-Canada — un chenal impraticable et inachevé dans le lac St. Pierre — et des canaux magnifiques qui relativement ne produisent presque rien.
C’est à cause de ces folies que nos dépenses publiques sont plus fortes aujourd’hui, relativement, que celles d’aucun autre peuple.
Néanmoins, comme il n’existe pas, en Canada, de taxes directes pour le soutien du gouvernement, le peuple de ce pays en est encore à s’imaginer qu’il n’est pas taxé.
Le système des taxes indirectes, le plus commode peut-être quand il fonctionne sous la direction d’hommes habiles, honnêtes, — ou au moins exactement surveillés par un peuple éclairé, — peut devenir extrêmement dangereux, dans les pays où une oligarchie domine.
Il est vrai que le peuple ressent moins le fardeau des taxes indirectes ; d’ailleurs il a, pour ainsi-dire, le choix de ne les pas payer : mais aussi, comme il ne se rend pas exactement
- ↑ Le Haut Canada a obtenu, à même l’argent provenant de la dette publique, £440,000 pour chemins et améliorations locales, le Bas-Canada £180,000.