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autre caractère. Ici le progrès marche trop clairement à reculons. Mais je ne dois pas oublier non plus que j’ai affaire à un ennemi du progrès.

Que V. G. puisse être fâchée de voir toutes ses petites manœuvres contre ses propres collègues mises au jour avec un peu de détail, je conçois cela ! Mais pourtant, Mgr, je n’ai fait que répéter ici ce que deux ou trois cents piètres ont dit ailleurs. Sont-ils aussi dans les cas réservés ?

Que V. G. ait subi un peu de dépit ou de surprise à voir dévoiler devant un public qu’elle croyait avoir profondément endormi sur ses actes, toute sa haute stratégie à l’endroit du pouvoir civil, cela se comprend aussi. Mais ce que l’on comprend difficilement, c’est que V. G. ait cru avoir endormi tout le monde sur une question aussi vitale que celle de soumettre toute la législation d’un pays à des étrangers qui n’ont aucune teinture de droit constitutionnel. Il reste toujours dans un pays, Mgr des hommes qui ne veulent pas être traités en enfants.

Enfin que V. G. ait ressenti quelque petite ébullition intérieure en lisant les légères piqûres à son amour propre que je me suis permis de coucher sur papier, le public en a vu la preuve en lisant cette circulaire où l’insulte gratuite tient lieu de discussion. Mais je pense, Mgr qu’il eût été plus habile à un Évêque de ne pas paraître si fâché. V. G. est tombée précisément dans le piège où se laissent toujours choir les novices en polémique. Elle a fait de la colère là où un peu de discussion lui eût attiré du respect. Aussi au lieu de mettre les rieurs contre moi elle les a rangés en ligne formidable contre elle-même ! Je la remercie donc cordialement de la belle position qu’Elle m’a faite en ne conservant pas le calme qui convient à un Évêque.

Quel singulier contraste, Mgr, entre V. G. et moi, si j’ose me mettre ainsi en juxtaposition avec elle ! C’est le saint Évêque qui s’emporte au-delà de toutes bornes, et c’est celui qu’il qualifie d’impie et d’ennemi de l’Église qui sait se posséder et ne sort pas de la phraséologie de l’homme bien élevé ! Les spectateurs voient avec ébahissement le pasteur assommer la brebis de son mieux, et c’est celle-ci qui est obligée de supplier le pasteur de se calmer un peu et de ne pas jeter ces cris de fureur qui dispersent le troupeau ! Le plus chrétien des deux, Mgr ne serait-il pas, par hazard, celui qui se fâche le moins ?

Mais je dois citer ici, pour faire bien juger le lecteur de nos styles respectifs, la portion de la circulaire au Clergé ou V. G. s’est si malheureusement oubliée.

J’ai depuis de longues années fait une collection des injures que l’on m’a dites, et je suis bien aise d’ajouter comme couronne à cette collection un petit recueil d’injures mitrées :

« Le livre de l’Hon. L. A. Dessaulles est en effet une grande guerre ecclésiastique, parce qu’il attaque avec un orgueil satanique le vicaire de Jésus-Christ que l’univers catholique vénère avec tant de raison ; parcequ’il outrage avec une insolence révoltante les saintes congrégations romaines, qui sont des tribunaux souverainement augustes et qui commandent le respect du monde entier ; parcequ’il traîne dans la boue, avec une témérité inexplicable, le Sacré Collège qui se compose d’hommes éminents sous tous rapports ; parcequ’il noircit avec une malice dont lui seul peut être capable le Clergé canadien qui pourtant a bien mérité de son pays ; parcequ’il vilipende l’ultramontanisme, dont il fait une erreur monstrueuse ; parcequ’il prétend qu’il a engendré le droit chrétien qui fait du pape un souverain absolu dans le domaine temporel ! Comment la Minerve, qui a sans doute lu toutes ces horreurs, a t-elle pu, par son annonce, frayer à ce livre détestable la route pour arriver au sein de nos familles chrétiennes ?

Puis je lis dans le dispositif :

« Quant au libelle intitulé la grande guerre ecclésiastique, il ne sera pas permis, comme il a été dit plus haut, de le garder pour en faire un usage quelconque, excepté pour le réfuter, si l’on en a obtenu la permission de l’Évêque. Ceux qui, après en avoir été avertis convenablement, s’opiniâtreront à le garder chez eux, tomberont dans un cas réservé, dont ils ne pourront être absous que par l’Évêque et ses grands vicaires. »

Eh bien, franchement, Mgr ces terribles injures conviennent-elles bien à un Évêque ? Si j’ai dit quelques vérités un peu dures ; si j’ai pris les Évêques en flagrant délit de contra-