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arbitraire en prohibant un livre où il n’est pas capable d’indiquer une fausse citation ni un faux avancé, mais y a une forte masse non instruite qui croit à ma culpabilité simplement parceque V. G. l’affirme. Il y a tel livre que V. G. recommandera où je montrerai des mensonges audacieux, en les prouvant et non en insultant l’auteur ; il y a tel autre livre où V. G. ne verra aucun mal et dans lequel je montrerai les supercheries les plus révoltantes ; et il y a tel autre livre où V. G. verra des choses horribles et où je prouverai que tout est vrai et qu’il est non seulement permis mais obligatoire de le dire.

Dès que V. G. se met en conflit avec le pouvoir civil, elle provoque fatalement la discussion de ses vues et l’étude de ses projets. Et qu’elle veuille mettre de côté le pouvoir civil dans l’érection des paroisses, on qu’elle veuille avoir seule le contrôle des régîtres de l’état civil, elle ne peut pas espérer que tous les citoyens vont se courber servilement sous ces exigences. Forcément la question de la suprématie ecclésiastique sur le temporel surgit de ses actes. Et il ne sera pas permis à un écrivain laïc de montrer les conséquences qu’a produites ce système dans d’autres pays ! Ce sera insulter l’Église, le Pape, le sacré collège, la sainte curie, et les Évêques et le Clergé local, que de montrer dans quelles terribles erreurs sur ce sujet sont tombés les Évêques et les prêtres de tous les pays ! Le Clergé aura ainsi le droit de faire la nuit sur nous en nous empêchant de parler dans la Législature, d’écrire dans la presse et en nous défendant au confessionnal même de penser ! Et personne ne pourra vendre un livre où l’on dira la vérité au peuple sur sa souveraineté morale et sur l’empiètement ecclésiastique !  ! Mgr, allez plutôt proposer ce système aux nègres de la Caffrérie, je n’y vois pas d’objection quant à ce qui me concerne ; mais que V. G. veuille donc bien ne pas venir nous dire avec aussi peu de sans gêne : « Prenez mon ours, » car nous sommes en pays civilisé. Je suis surpris que V. G. ne paraisse pas s’en douter.

Quand un homme cherche de bonne foi à élucider la vérité, il a droit au respect même s’il se trompe. Et quand il affirme des choses justes appuyées sur des faits indéniables, on n’a pas le droit de mettre en cas réservé ceux qui le lisent. Il y a au moins cent prêtres qui ont mon livre à l’heure qu’il est. Supposons qu’il y en ait quarante dans le Diocèse de Montréal, et il y en a davantage, je ne suppose pas qu’ils le gardent avec l’intention de le réfuter ; d’ailleurs ils ne pourraient le faire sans la permission de V. G. qui les en informe positivement. Sont-ils tous en cas réservé ? Les laïques instruits qui l’ont sont-ils aussi en cas réservé ? Voyons, encore une fois, est-ce que V. G. ne verra pas ce danger de ces déclarations ?

Ceux qui, prêtres ou laïcs, voient clairement que V. G. se trompe dans son appréciation ; ceux qui savent que mes citations et mes affirmations sont correctes ou vraies ; ceux qui savent que les faits que j’ai cités ne peuvent être niés, et que conséquemment V. G. se trompe encore plus sur le fait que dans l’appréciation, ceux-là sont-ils dans les cas réservés pour garder un livre où ils ne voient que du vrai ? La vérité est-elle au-dessus des Évêques, Mgr, oui ou non, et des Papes aussi ?

Eh bien, Mgr, tout ce que je demande aujourd’hui, c’est une discussion loyale avec un prêtre instruit, chacun sous son nom ; et je me fais fort de montrer les prodigieuses falsifications de texte dont nombre d’auteurs recommandés par la Cour de Rome comme seuls dignes de foi se sont rendus coupables. Et j’en tirerai la conclusion qu’un Évêque n’a ni dans sa conscience ni dans sa charge le droit de condamner un livre écrit pour dévoiler ceux qui trompent sous le couvert de la religion. On a toujours le droit de rétablir les textes dans leur intégrité, car c’est indiquer le mensonge au profit de la vérité.

Je proteste donc hautement contre l’acte de V. G. qui est aussi déraisonnable qu’impraticable, car V. G. doit bien se mettre dans l’esprit que sa défense de garder mon livre chez soi ne sera généralement pas observée parce