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vous échappera toujours par quelque côté, et cela, à son insu et sans l’avoir voulu.

Elle a des ailes qui vous manquent : qu’il s’agisse d’idéal ou d’amour, comme elle est guidée par le sentiment et que l’égoïsme lui nuit moins qu’à vous, elle a tôt fait de vous dépasser. Ne lui en veuillez pas, plaignez-la plutôt ; c’est la source de ses plus cruels désappointements. Vous oubliez trop sa délicatesse et sa sensibilité. Si vous étiez un peu attentifs, vous devineriez la prière sans parole, l’appel timide, le serrement de cœur, la tristesse et l’inquiétude déguisées sous le sourire.

Le bruit de vos paroles rudes, le lointain de vos réponses, l’absence évidente de votre cœur effarouchent la confidence nécessaire, et involontairement mais sûrement, vous brisez un à un les liens délicats qui reliaient votre âme à cette âme de femme qui comptait uniquement sur vous et qui s’attendait à être traitée au moins d’égale à égal.


XXVI

La pierre des bavardes


Il y a au Musée historique de la ville d’Orléans une curieuse tête de pierre sculptée, elle est très laide, un peu plus grande que demi-nature : ce n’est pas le débris d’une statue décapitée, mais un objet complet, dont le crâne dénudé porte un anneau, dans lequel passe une chaîne de fer forte et courte. Au--