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nelle, il doit entrer beaucoup de bon sens et une grande sincérité. Quand on se connaît à fond, on n’a pas l’audace d’exiger de ses amis qu’ils ne fassent jamais d’erreurs !

Si nous étions plus simples, nous ne nous défierions ni de nos amis, ni de nous-mêmes. Au lieu de nous demander si nous les désappointons, nous nous contenterions de les aimer en le leur prouvant dans toutes les circonstances, et en appréciant ce qu’ils font pour nous sans la vilaine arrière-pensée qu’ils auraient pu faire davantage.

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Un long silence, puis je repris doucement : Les tristesses inévitables, les grands malheurs ne peuvent être évités, et il nous semble à certaines heures terribles que nous ne sortirons jamais de leur ombre. C’est une erreur. Toute douleur s’apaise avec le temps, les deuils les plus cruels deviennent légers à porter, et j’ai déjà pensé que cet oubli relatif était une honte pour nous. Je ne le crois plus. Dieu permet à la douleur de passer mais il ne veut pas qu’elle demeure, car pour vivre, il faut du courage et la tristesse prolongée le mine et nuit à l’accomplissement de notre devoir.

Et tout ce que je viens de vous dire je le sens et je le comprends mieux dans la solitude et le recueillement de la campagne. Toute la beauté, toute la lumière du dehors, m’entrent dans l’âme et me permettent de voir et d’entendre la vérité qui me parle.