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ils n’ont jamais pensé à voir, si c’est visible ; à deviner, si c’est dissimulé, ce que peuvent couvrir les apparences.

Le genre d’esprit des femmes les porte naturellement aux analyses de sentiment, et leur intuition leur sert admirablement aux évaluations morales ; aussi, celles qui sont attentives ont-elles l’occasion et le bonheur d’arriver à cette entente dans l’amitié qui n’est après tout que l’intelligence des âmes entre elles.

On se demande, avec étonnement, pourquoi les femmes ne se servent pas davantage de leur don de pénétration pour connaître l’âme de leurs enfants ? C’est vraiment d’elles que l’on pourrait dire, en toute vérité, qu’elles « tiennent dans leurs mains » des petites âmes toutes neuves où il n’y a rien encore. Sous la chaleur de leur tendresse, l’âme de l’enfant s’entr’ouvre lentement, se déroule peu à peu, et il semble que, puisqu’elles y mettent ce qu’elles veulent, elles doivent facilement en suivre le développement, et n’avoir qu’à lire à mesure que la vie s’imprime dans ces âmes et les façonne.

Comment se fait-il alors, que, trop souvent, il vient un moment, où l’âme de la jeune fille se referme pour sa mère comme ces anciens livres à cadenas dont la clef serait perdue ? La mère ne « sait » plus son enfant, et l’enfant, devenue ce que j’entendais drôlement appelé par l’une d’elles « un petit comprimé », se dérobe à toutes les investigations.