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Voilà donc nos petites filles élevées dans l’ignorance complète de tout, dans un milieu où la vertu et la perfection sont, ou paraissent être, l’apanage de tous. Il est évident qu’en prenant contact avec les faits précis et les gens vivants, il y aura des heurts, car les jeunes filles ne sont ni prévenues de ce qui les attend, ni préparées à accepter les choses comme elles sont.

L’inconvénient grave de cet idéal, c’est qu’il est dressé de toutes pièces au moyen de toutes les perfections : mais on a oublié une chose ! C’est que c’est un homme ou une femme qui doit le représenter !

L’être humain, quel qu’il soit, est sujet aux doutes, aux défaillances et aux chutes, et lorsque la jeunesse a élevé, loin du monde, la statue de son rêve, et qu’elle lui découvre des pieds d’argile, son enthousiasme trompé est trop prompt à la croire changée en statue de boue.

Les jeunes sont entiers dans leurs jugements, et ils ne sont pas indulgents. Quand une jeune fille — par suite de son éducation — ignore non seulement l’existence du mal, mais celle des réalités de la vie, quand elle a attribué à l’homme qu’elle aime toutes les vertus qu’on lui a appris devoir seules le rendre digne d’elle, et qu’elle le découvre comme il est, avec des défauts et des qualités, elle croit tout perdu parce que son idole n’est qu’un homme !

On a négligé de lui apprendre ce qu’elle est elle-même : un petit composé de beaucoup