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et on les regarde en souriant car ils sont gentils, et on les aime de s’aimer ! S’en vont-ils pourtant vers la grande déception qui brise tant de vies ?… peut-être, hélas, peut-être ! On en a tant vus croire qu’ils ne pourraient vivre l’un sans l’autre en venir à ne plus pouvoir se supporter !

Et pourquoi, sinon parce qu’ils ont cru s’aimer et qu’ils ne se connaissaient pas et n’aimaient que l’amour et leur chimère ! Parmi tous ces jeunes qui égrènent le chapelet d’amour dans le vent qui chante, il y a trop d’êtres légers et papillonnants qui n’ont jamais été sérieux, et Dieu sait, pourtant, que rien n’est plus grave que l’amour, et que s’il n’atteint pas les profondeurs de l’âme il n’existe pas.

La jeune fille est flattée des attentions qu’elle reçoit, de l’admiration qu’elle provoque ; à cela s’ajoute le joli plaisir de recevoir son ami et de sortir avec lui, et le vilain plaisir d’exciter ainsi l’envie de ses amies. Après quelques semaines de ce passe-temps, elle est convaincue qu’elle aime celui qui lui fait la cour et qui lui a peut-être donné le meilleur de son cœur, lui ! Et la voilà qui se laisse aller sur la pente douce qui la conduit au mariage : elle s’y prépare en respirant le parfum des fleurs et en croquant des bonbons qu’il lui apporte sans songer à se demander de quelles qualités et de quels défauts est fait l’homme qu’elle va jurer d’aimer uniquement et à qui elle va promettre d’obéir toujours ?