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XLVII

Autour du feu


Une fin d’après-midi dans le salon tiède et fleuri de narcisses au cœur d’or ; le feu brûle doucement en jetant des lueurs roses dans l’ombre qui envahit la pièce… Nous sommes quatre qui avons dédaigné le bridge de rigueur pour philosopher à notre manière en remontant aux méfaits de la première Ève et à la lâcheté du premier Adam, qui repoussa la responsabilité de la faute partagée et qui cria comme un enfant peureux : « Ce n’est pas ma faute ! C’est elle ! » Vrai, j’aime mieux Ève qu’Adam, il eut un piteux rôle, le roi de la création !

Un petit silence où flottent des pensées qui frémissent, et l’une de nous s’avise de demander : « Avez-vous jamais pensé qui vous voudriez être si vous n’étiez pas vous ? »

Cela vous étonnera peut-être, aucune ne put trouver quelqu’un qui lui parut, « en tout », préférable à elle-même. Notez bien, je vous prie, les mots « en tout » qui nous défendront contre l’accusation d’une vanité indue et d’une prétention exagérée.

L’une nous plaît par sa grâce et son charme, nous admirons l’intelligence d’une autre, et la beauté d’une troisième nous paraît enviable. Volontiers, nous cueillerions un peu d’exquis à toutes les femmes que nous admirons pour nous faire une personnalité idéale,