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nous savions rester en communion avec eux. Ils savent maintenant le secret des grands pourquoi qui font gémir l’humanité, ils comprennent le divin et le surnaturel que nous cherchons si fort à ne pas percevoir autour de nous ; avec leur seule âme dépouillée des imperfections mortelles et des ignorances humaines, comme ils nous parleraient si nous les interrogions !

Le souvenir de leur vie si bien remplie ou si brusquement arrêtée ferait naître en nous une inquiétude salutaire. Regardant notre vie, ce que nous avons fait en regard de ce que nous avons voulu faire, nous sentirions qu’il faut nous hâter d’agir, car nous ignorons quel temps nous sera encore accordé. J’arrivai au cimetière en méditant ainsi. Tout était mort autour… partout… Le ciel lui-même semblait une chose éteinte couvert d’un linceul gris. Je frissonnai comme si la mort eût touché mon cœur et je sentis profondément la désolation de ce cimetière d’où si peu de prières s’élèvent à cette heure tardive.

Soudain, un rayon du soleil couchant fit une trouée, dans ce gris, souleva les atomes humides suspendus en l’air, les fit scintiller et mit dans l’espace comme la tombée de larmes pleurées doucement. Puis le rayon se posa sur le grand Christ du Calvaire qui en recueillit toute la lumière et devint un Christ resplendissant dont les bras étendus bénissaient les morts et appelaient les vivants.