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XXV

La poignée d’argile


Le vent furieux et fou, dont les longs crescendos emplissent la cheminée de plaintes lamentables, ressemble à d’autres vents de mars lointains, ils évoquent l’image d’une petite fille, pelotonnée en rond, comme une chatte paresseuse, dans un fauteuil immense ; elle lit de vieux contes anglais, et l’un d’eux pénétra un jour dans sa mémoire et s’y blottit dans un coin d’où il surgit, aux heures grises, où lasse, mécontente de soi ou de son sort, on est disposée à critiquer les dispositions de la mystérieuse Providence.

Ce conte que je n’ai pas inventé, est devenu mien cependant par l’usage que j’en ai fait. Je veux vous le dire, et plaise à Dieu, que pour vous comme pour moi, il éclaire parfois les parties sombres de votre âme où se groupent en murmurant les questions angoissantes.

Sur les bords d’une rivière, il y avait une poignée d’argile : c’était de l’argile commune et lourde, mais elle était remplie d’orgueil, et elle rêvait d’emplir le monde de sa gloire… quand on aurait découvert sa valeur. Elle vivait dans cette attente. Elle avait vu si souvent les arbres secs se garnir de feuillage, les plantes se couvrir de fleurs, la terre noire se parer de verdure ! Muette et désolée, la poignée d’argile avait assisté à