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vie intérieure finit par créer en nous une lassitude infinie.

Il faut quelquefois s’éloigner du mouvement et du bruit des petites actions et des vaines paroles, afin de retrouver son âme qui n’ose se montrer, comme si elle avait honte d’être belle au milieu de ceux qui oublient qu’ils ont une âme.

Hélas ! c’est vrai, pourtant, que nous défendons à notre âme d’être belle, que nous avons peur qu’elle soit trop sensible, trop généreuse ou trop sincère.

À vivre dans l’artificiel et le mensonge du monde, nous devenons si timides et si pusillanimes que nous rougissons d’être autrement que les autres, même si cet autrement est meilleur.

Mais « dès que les lèvres dorment et que les âmes se mettent à l’œuvre », toute cette comédie cesse.

N’avez-vous pas le souvenir d’heures de solitude qui vous ont ouvert un coin de ciel, et qui resteront dans votre vie comme des échelons que vous avez gravis vers plus de vérité ?

N’avez-vous pas éprouvé par moments, l’impression délicieuse d’être allégés de tout fardeau, d’avoir les bras libres pour les tendre vers les choses sereines et pures où vous sentiez Dieu lui-même ?

Ces heures bénies, je les ai vécues, plus d’une fois, dans la solitude des bois où chaque âme d’arbre me parlait avec une voix distincte. En les écoutant, j’ai sou-