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Quand elle s’éveille, une table, dressée pour la communion, est près de son lit, et sa mère penchée sur elle lui dit tendrement : « Tu auras aussi ton Noël, ma mignonne, tout est prêt, dans quelques minutes le bon curé viendra… »

Quelque chose de brisé dans la voix basse, la surprise de ces préparatifs, l’étrange faiblesse qui l’engourdit, révèlent soudain à la jeune fille ce qu’on n’a pas encore osé lui dire, et c’est comme si elle avait toujours su qu’elle s’en irait ce soir. Elle regarde longuement sa mère et celle-ci devine que l’enfant a compris.

… Ainsi c’est fini, elle est presque de l’autre côté de la vie et elle a si peu connu celui-ci ! Ses jeux, ses études, ses rêves, la tendresse donnée et reçue, c’était donc toute la vie ? Elle a parfois entendu parler de la douleur, du mal, des difficultés qui remplissent l’existence, elle n’en a connu que la beauté et la joie. Le ciel si difficile à conquérir, disait-on, est là, à sa portée, on le lui donne, comme ça… pour rien.

L’heure grave n’a pour elle ni terreurs, ni angoisse, elle éprouve plutôt un étonnement que ce soit si simple de mourir, et cela la sort de sa torpeur ; son âme est attentive pendant que des mains invisibles et douces continuent à détacher les liens fragiles qui la retiennent encore. Et dans l’ombre de la mort, une grande lumière pénètre en elle, son visage pur rayonne, et quand le prêtre