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I

À travers les vergers


Le ciel d’un bleu très pâle se fondait à l’horizon en une longue barre grise, les feuilles roses et les feuilles d’or pleuvaient autour de nous, la rivière colorée de nuances de pastel courait avec un petit murmure bavard, et l’auto filait et nous emportait, doucement engourdis par le mouvement, l’air frais et le bon parfum des sous-bois humides.

Je ne sais à quoi pensaient les autres, moi je me laissais vivre dans une quiétude reposante et rare : je regardais et j’admirais, sans dire les mots qui troublent et ennuient le silence.

La route longeait le Richelieu, nous passâmes le long des vergers, et les pommiers brillaient au soleil. Des hommes et des femmes cueillaient les beaux fruits, mais, parce que nous allions vite et qu’ils étaient loin, nous ne les entendions pas parler et ils étaient les personnages du ravissant tableau !

Puis il fallut traverser un village où l’on remuait tout de même un peu : la cloche de l’église sonnait un baptême, les gens sur leur porte nous saluaient, des gamins de l’école se poursuivaient en se bousculant, des chiens aboyaient, des poules voulaient