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Mes petits, il faut conserver, à tout prix toutes les racines de votre âme canadienne-française ! Comme elle vous a été transmise, ainsi devez-vous la léguer à ceux qui viendront après vous, à vos enfants, à vos petits enfants. La race, c’est une chaîne, une chaîne très solide, très longue qui relie le passé lointain à l’avenir infini.

Les âmes, mes petits, ont une vie bien supérieure à la vie de nos corps, et ce qui nuit à ces derniers, les misères, les persécutions, la souffrance donnent aux premières plus de beauté et plus de force.

Si l’on vous opprime, si l’on veut vous empêcher d’apprendre le français et de le parler, cela ne peut pas du tout nuire à votre âme canadienne-française ; au contraire : tenez bon, ne cédez ni à l’injustice, ni à la tentation de vivre plus tranquilles en devenant anglais et vous serez de braves petits hommes dignes de vos ascendances françaises et canadiennes, et dans des centaines d’années, ceux qui descendront de vous, continuant la chaîne française, vous loueront et seront fiers de vous appartenir. »

Les enfants écoutaient et leur âme enfantine s’éveillait à une vie nouvelle qu’ils comprenaient après ne l’avoir qu’instinctivement sentie. En passant dans ces jeunes esprits que rien n’encombre, le doux enseignement de la petite maîtresse d’école a fait pénétrer la noblesse de leurs origines, la justice de leurs revendications, la beauté de l’âme de la race qu’ils doivent conserver à travers tout, malgré tout.