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LVIII

Précurseurs


Vous connaissez, n’est-ce pas, ces heures de lucidité, où l’âme, comme affranchie des mille liens qui l’attachent aux choses de la terre, s’élève, légère et ailée, au-dessus des petits intérêts, des petits soucis, des petites occupations ordinaires pour regarder la vie de haut et de loin, éclairée, par en dedans, d’une lumière qui se reflète sur tout ce qu’elle observe ? Quelques instants, elle vit pleinement sa vie spirituelle et magnifique, et même les secrets de Dieu lui laissent deviner un peu de leur mystère.

C’est durant une de ces heures rares et bénies que j’ai cru comprendre, qu’après avoir donné notre blé, notre argent, nos soldats pour le salut du monde, nous n’avons rien fait si nous gardons une âme mesquine, sourde aux grandes voix qui appellent l’humanité à une vie plus haute et plus surnaturelle.

Je me suis souvent plu à évoquer saint Jean-Baptiste parcourant la Judée, et criant sur les routes à ceux qui le suivaient : « Préparez les voies du Seigneur, car le royaume de Dieu est proche. » Il me semble que les anges, aujourd’hui, comme le prophète, autrefois, passent et repassent au-dessus de l’humanité en disant à tous : « Préparez les voies, car l’Esprit de Dieu vient re-