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Paul, un Pierre à un Louis, une Julie à un Marthe, etc.

Mais, me direz-vous, cette science est très indiscrète puisque notre nom est connu de tous ceux qui veulent le savoir, elle est surtout cruelle, puisque nous ne pouvons changer ce nom fatal choisi par nos parents. Vous avez bien raison, mais qu’y faire ? Ce que j’en pense ? Et vous ?


LIV

L’ami


Quand on est très jeune, on dévore les livres, on leur communique sa hâte de courir et de connaître les dénouements ; les mots importent peu, les cadres, pas du tout : on veut une histoire, une histoire de guerre ou une histoire d’amour, mais des faits. On ignore l’âme du livre, la pensée qui a inspiré à l’auteur ces pages que l’on feuillette comme on effeuillerait des fleurs : après avoir respiré leur douce et vague odeur, on laisse glisser à terre les pétales froissés, et après avoir fermé le livre, on oublie le titre et le nom de l’auteur.

Mais on vieillit : les jours gris viennent qui paraissent longs, ou les journées encombrées où l’on vit dans le chaos ; on lit alors plus lentement, en cherchant l’écho de son ennui ou le repos de ses agitations, et on commence à faire un choix parmi les auteurs. Les histoires nous intéressent moins que la