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discutent et sont à tour de rôle moralistes et séducteurs. Quand l’Amour entre dans l’âme, tous ces petits esprits se taisent, s’inclinent, car il a grande allure, ce Vainqueur, mais je leur vois une ironie discrète : ils attendent… et chacun garde sa place. C’est qu’ils savent parfaitement que leur effacement est temporaire et qu’il n’est pas d’amour assez grand pour empêcher un caractère humain de se manifester.

Que le grand amour dure ou qu’il passe en étoile filante, les petits esprits intérieurs, un instant éblouis et étourdis, recommencent bientôt à s’agiter dans les pauvres âmes que le plus parfait amour ne peut refaire !

Je conseillerais donc aux jeunes filles qui croient fermement que leurs défauts dépendent de leur entourage et que le mariage fera épanouir leurs perfections, de se guérir vite de cette illusion, et de chercher à se bien connaître afin d’être en garde contre leurs tendances fâcheuses.

Oh ! je ne médis pas de l’Amour, c’est un grand maître et qui les aidera certainement à trouver le meilleur de leur âme, mais qu’elles ne se flattent pas de devenir des anges sous son empire ; elles seront ce qu’elles sont, et peut-être un peu pires, car elles auront plus de contrariétés et plus de causes d’énervement.

L’Amour qui transforme — car il existe — est de qualité précieuse et rare et on le chercherait en vain dans les petites âmes fri-