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profondément que les disparus sont vivants, et de l’infini où ils ont été élevés, leurs conseils austères pénétraient dans mon cœur lâche comme des lumières qui faisaient des blessures.

« Il n’y a pas de grandeur morale sans souffrance, disaient-elles, vous l’admettez, et pourtant vous la fuyez, pauvres de la terre. Vous ne savez pas prier ! Vous demandez à Dieu d’écarter les obstacles et d’éloigner la douleur ; priez seulement pour avoir la force de vaincre les uns et d’endurer tout ce qu’il veut, sans conditions et sans limites. Lorsque Dieu vous comble de ses bienfaits, vous savez quelquefois le remercier et glorifier sa Bonté, mais dans la désolation de l’épreuve, vous refusez de reconnaître cette Bonté, et il vous arrive de la nier. Vos prières sont mesquines et égoïstes. Sans cesse, les mains tendues vous criez : donnez ! donnez ! Et que lui offrez-vous à ce Dieu à qui vous demandez tant ? Pourquoi détournez-vous de Lui tant de votre temps, tant de votre cœur, tant de votre vie, oubliant sans cesse qu’il vous a tout donné et que vous Lui devez tout ? Vous ne comprenez rien, vous ne voulez rien savoir, vous avez peur de la Vérité, et nous qui savons, et dont la tendresse s’éclaire à la lumière divine, nous vous supplions de nous entendre, car nous vous voyons marcher vers la mort les mains vides et les yeux fermés. »

L’air était rempli du murmure des voix mystérieuses, et j’avais la sensation dis-