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dans sa coiffe de dentelle. Elle venait au-devant de moi souriante, si menue et si blanche qu’il me semblait arriver chez une fée, la dernière, la fée sereine dont la douceur me pénétrait. Elle n’avait pas d’autre souci que de bien aimer le bon Dieu, de dire du bien des plus vilaines gens, de faire pousser ses fleurs et de nous vanter l’intelligence de sa chatte qui ronronnait, pendant que sa maîtresse m’ouvrait naïvement sa belle âme où je me promenais charmée. Combien de fois, curieuse de voir la place qu’avait pu tenir le malheur dans cette vie, l’ai-je fait parler de son passé. De sa jolie voix un peu fêlée, elle me racontait les événements de sa vie simple, mais sans commentaires, et pour parler de ses deuils, elle gardait dans ses yeux limpides, la même petite lueur caressante où il y avait comme le sourire de l’âme heureuse malgré tout, au-dessus de tout.

Un jour, je lui laissai voir l’agitation et l’inquiétude d’une âme plus compliquée que la sienne et elle me dit : « Ah ! ma petite, il faut être plus simple, vivre au jour le jour, en aimant bien le bon Dieu, ce qui équivaut à avoir bien confiance en sa bonté. À quoi sert de s’inquiéter puisque nous ne pouvons rien empêcher de ce qu’il veut ! ».

Je vous livre la recette de la petite vieille dame heureuse dont l’âme voltige autour de moi, ce soir, parce que, de là haut, dans la nuit maintenant resplendissante, elle a vu