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tord dans les flammes : elle la maintient avec le tisonnier de l’air grave et dur d’un exécuteur des hautes-œuvres.

Je feins de ne rien voir, mais que toute cette scène muette me révèle de choses tragiques : mon cœur se serre en devinant ce qui est, en prévoyant ce qui sera.

Je ne sais ce que la jeune fille voulait dire à son fiancé : quoi que ce soit, elle a manqué de confiance, elle a eu la vision de son incompréhension à lui… donc, elle ne l’aime pas parfaitement, comme on doit aimer le compagnon de toute sa vie.

L’amour dans lequel entre l’estime, un peu d’admiration, le besoin de se confier et d’être soutenue est toute confiance. Il ne peut vivre dans la dissimulation, les réserves et les restrictions.

Si l’enfant hésite maintenant à laisser le fiancé lire dans son âme, si elle lui cache ce qui l’agite et la fait pleurer, que sera-ce plus tard, quand le fiancé, devenu le mari, aura nécessairement perdu du prestige dont l’enveloppent les illusions d’un peu d’inconnu ?

J’aurais voulu lui dire à cette enfant : ce n’est pas aimer que de se défier : ou bien il est digne de ta confiance et donne-la-lui entière, ou bien, il ne la mérite pas, et ne l’épouse pas ! Si tu lui fermes ton âme, tu es perdue, ton bonheur est compromis.