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C’est parce que je le crois que j’aime le plus petit brin d’herbe, et que j’évite d’écraser la moindre fleurette.

Ainsi suis-je revenue de la montagne les mains vides : sur mon chemin les anémones rosées et les violettes fines n’ont pas été cueillies ; je me suis agenouillée pour respirer leur parfum et leur fraîcheur et j’ai continué ma route sans un regret de ne leur avoir point fait de mal.

Que n’avons-nous le même scrupule avec les âmes des enfants et les âmes des jeunes filles, encore éblouies et grisées de la beauté qu’elles découvrent en ce monde.

Trop souvent, par nos désenchantements, nos dégoûts, nos rancunes, nous atteignons rudement leurs âmes fraîches et nous les meurtrissons irréparablement.

Je ne pardonne pas aux pères leurs diatribes contre l’universelle malhonnêteté des hommes ; aux mères, leurs discours fulminants contre l’égoïsme des hommes ; aux blasés, leurs rires sardoniques, aux découragés, leur tristesse qui se refuse à l’espoir ; aux malveillants, leurs lunettes fumées au travers desquelles ils voient noirs le ciel et la terre.

Il serait plus sage, plus efficace et moins dangereux de mettre dans le cœur des enfants le culte de l’honneur et la religion du dévouement, d’y développer la foi, l’espérance et l’amour, les laissant croître, ainsi dans