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LETTRES DE FADETTE

profondeurs de son âme. Car il lui faut parader, tenir son rang, jouer la comédie du bonheur, et sa vie est probablement plus compliquée et plus difficile que celle de la petite employée qui s’est exclamée : « Est-elle chanceuse, celle-là ! »

Et dans l’église, de plus en plus déserte, je restai longtemps, triste de tant de douleurs coudoyées, mais singulièrement illuminée de la conviction que tout est bien ainsi, et que toutes les vies seront endurables aussi longtemps que nous jetterons nos angoisses et nos désespoirs aux pieds de Dieu qui les attend et qui veut que nos âmes ne puissent être profondes et belles qu’à la condition d’être creusées par les larmes et transformées par le travail et la souffrance.


LVIII

Retour de théâtre


Comme elle est divertissante et fine cette comédie de « La Mégère apprivoisée », que la violence systématique de son mari réduit à une obéissance si aplatie.

Je m’en suis franchement amusée, en me disant que les méthodes shakespeariennes, impossibles à employer de nos jours, avaient du bon. Jamais il ne nous sera donné de voir une mégère devenir aussi suave, nous sommes trop civilisés ! J’ai eu la simplicité d’exprimer cette opinion devant d’autres femmes,