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LETTRES DE FADETTE

Or, je ne vous cache pas que ce rôle me semble assez ingrat dans tous les cas, et dans le mien il est impossible. Il faut tant de sagesse pour diriger les autres… et au moins faudrait-il avoir un semblant d’autorité et je manque de l’une et de l’autre !

D’ailleurs, sans douter de votre sincérité, ce qui serait vraiment très vilain, je sais qu’en me faisant vos confidences, vous êtes surtout entraînés par le besoin de parler de vous, de plaider d’avance les causes que vous sentez vaguement mauvaises. Vous m’exposez vos petites affaires sentimentales en les enguirlandant, pour moi comme vous le faites pour vous, et au fond, rien ne vous déplairait tant que de me voir les tirer au clair et vous dire : « Elle n’est pas jolie ! Il faut la sortir de votre cœur ! »

Ah ! ces mystères que l’on trouve au fond des cœurs de femmes : elles cultivent, sans savoir d’où elles viennent, de petites plantes inconnues qui peuvent devenir bien encombrantes avec le temps… et l’ombre !

Moi, je me défie de tout ce que l’on ne veut pas regarder en face, de tout ce que l’on refuse de définir clairement, de tout ce qui flotte en vapeurs fines et insaisissables dans les âmes féminines et dont elles font leurs délices.

La plupart de nos fautes et de nos erreurs sont faites de nos indulgences inavouées, mais réelles, pour ce qui n’est pas bien, de nos sen-