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S’ils voient un enfant craintif, se tenant à l’écart, n’osant se mêler aux jeux, ils n’interviennent que pour donner l’ordre sévère d’aller rejoindre les autres. Pourquoi ne suivent-ils pas le petit sauvage, et invisibles, n’entendent-ils pas l’accueil qui lui est réservé ? C’est une grêle de railleries, de taquineries, de brusqueries qui deviennent quelquefois des mauvais traitements. Ils sont dix contre un, et la pauvre petite victime est toujours frêle et incapable de se défendre, car les vilains poltrons se garderaient bien d’attaquer un garçon hardi et fort qui rendrait coup pour coup.

Et voilà justement où je veux en venir : c’est que les enfants ne pratiquent la générosité et la bonté que si elles leur sont enseignées, et c’est quand ils sont réunis en grand nombre qu’ils sont tentés d’opprimer les faibles, d’abuser de leur force et de toutes les supériorités qu’ils s’attribuent. Leur parle-t-on quelquefois de la lâcheté qu’il y a à battre les faibles et à tourner en ridicule les timides ? Leur inculque-t-on l’horreur de toutes les vilenies, depuis la délation jusqu’à la tyrannie ? Peut-être pas assez… et il arrive que ces petits écoliers devenus des hommes, traitent leurs compagnes comme autrefois les compagnons qui ne savaient pas se défendre. Ils continuent à mettre en pratique le système qui leur réussissait et qu’ils n’ont jamais en-