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III

Petite ville


Il m’est impossible — et je le regrette — de répondre directement aux si jolies lettres qui me viennent de la ville et de la campagne : je veux au moins remercier mes correspondants et mes correspondantes, et leur dire comme je suis sensible à leur sympathie : j’y puise un grand courage, et de l’ardeur pour mon travail qui en devient plus facile.

On me fait beaucoup de confidences : je m’arrête aujourd’hui à la plainte un peu amère d’une jeune fille qui habite une « petite ville endormie et plate où je moisis, madame ; vous pourriez à l’aide d’un microscope, voir la légère mousse verdâtre qui m’envahit ! »

Elle me fait ensuite une peinture de cette ville qu’elle juge bien sévèrement, il me semble : peu de gens cultivés, beaucoup de vulgaires commères ; ni bibliothèque, ni musique, ni théâtre : ce qui absorbe à un égal degré l’attention des habitants de la dite ville, ce sont les préoccupations ménagères et la chronique scandaleuse. La surveillance s’y exerce dévotement et sans charité, par des sacristines impitoyables qui ont peu de jugement et une langue très longue : dès qu’on s’écarte de la routine, dès qu’elles sont en présence d’un geste qu’elles ne comprennent pas, le rapport se fait, la condam-